dimanche 24 septembre 2017

Les Psaumes de la Renaissance. -4

Le 16ème siècle, par la Réforme en France amènera un changement fondamental dans les âmes en reposant la question du salut par la foi ou les œuvres et celle de l'incertitude de la résurrection et de la vie éternelle.
Jusqu’alors, le catholicisme se comportait comme le judaïsme et l’Islam qui affirmaient que Dieu existait physiquement. Aussi, tous ceux qui mettaient en doute cette certitude blasphémaient en insultant à la réalité de l’existence de Dieu et méritaient la mort, d’où la violence des guerres de religion.

Le doute incroyable qu’amena la réforme en posant ce préalable que seule la foi fondait l’église du Christ en primant les œuvres deviendra un véritable scandale pour les autres religions, catholicisme compris qui y voyaient poindre le danger de l’athéisme.
De même, elles estimaient que l’égalité entre hommes et femmes devant Dieu, défaisant le pouvoir de tous « pasteurs », pape compris, ainsi que l’inutilité des lévites faisait fi des prescriptions des Livres.

Cette foi nécessaire, ce doute incroyable, fondement du christianisme qu’apportait le protestantisme gênera le catholicisme du 16 au 18ème siècle. La foi et le salut ne dépendaient plus de l’église et du prêtre et ne sauraient qu’être une grâce divine avec pour conséquence que le vocable « église », n’étant plus lié à une organisation humaine rigide, structurée redeviendrait celle du Christ et ne se composerait plus que de membres à égalité devant Dieu qui se choisiraient librement un pasteur pour les aider.

Dans la liturgie catholique, les psaumes de David tiennent une place prépondérante parce qu’ils portent cette notion d’un Dieu physiquement présent et agissant sur nos vies. David n’a aucun des doutes du protestant. Il n’est qu’à se pencher dans les livres de Samuel : Dieu est vivant puisqu’il lui parle.
-Aurais-je la victoire demain ?
-Ton ennemi est dans ta main.
Dans l’esprit de Calvin, le psaume importait surtout dans la mesure où le croyant pouvait s’identifier à David qui propose de tenir, comme d’un modèle de louange des dialogues contractuels vivants avec Dieu. De plus, cela permettait d’affirmer à tous que le "religion" réformée fut la digne continuatrice de l’église chrétienne primitive rénovée. 

La Réforme française, fille de l’imprimerie semble, au départ s’inscrire dans un mouvement de recul de la pensée car elle affirme la primauté de l’écriture, le protestant s’obligeant à ne rien rajouter ni enlever à la bible or, ne serait-ce que le récit de la Genèse de la création de l’Univers, le protestantisme interdirait le doute scientifique.

Toutefois, hormis cet aspect de « ni ajouter ni retrancher à la parole de Dieu », les temples protestants français, dirigés par les anciens cooptés ou des élus créent des petites républiques qui « gangrènent » le royaume de France. Inacceptable pour le roi et la religion d’état.

La diffusion et la vulgarisation de la bible françoise d’Olivétan (Neuchatel, 1535) réalisée à partir des textes en hébreu et en grec, tout en corrigeant la Vulgate ainsi que le psautier permettront de sortir la religion du carcan de la langue de l’Empire romain, le latin, la langue du pouvoir pour la resituer dans celle du royaume de France.

Dès 1562, la sortie de plus de 50.000 exemplaires du psautier de Marot et de Bèze en français fut un succès « mondial » tel que tous, jusqu’à la cour de France chantaient les psaumes. Il se dit même qu’on les dansait au Pré au Clercs à Paris.

Dans les campagnes, et jusqu’à l’instauration de l’école obligatoire, toute la France parlait patois, chaque région possédant son « idiome». En 1702 et la guerre dite des Camisards, les seuls à manier parfaitement le françois furent ces protestants révoltés et il n’est qu’à consulter les archives et noter l’indigence des écrits des gradés militaires, des curés et des responsables de l’Etat pour se rendre compte que la langue françoise peinait à supplanter tous les parlers locaux.

C’est pourquoi, il est indéniable d’affirmer que le recueil de poèmes de Marot et de Bèze, le seul que possédaient les Réformés de France et de nombreuses familles catholiques, ainsi que la bible, cachés pendant plus d’un siècle stabilisèrent l’écriture et le parler françois dans toutes les couches dirigeantes et populaires du royaume.  Ils firent aussi souffler un véritable vent d’espoir pour la liberté de conscience et furent d’excellents « maître » d’école et une encyclopédie qui traitait de religion, de poésie, de musique, d’amour, de haine, d’amitié, de paix, de guerre, de gestion de l’Etat, des droits et devoirs des juges, des princes et du roi, de la primauté, non de l’Eglise mais de Dieu sur les hommes. Avec l’égalité et la justice sociale, les psaumes de la réforme, à la suite de l’évangile, appuyèrent fortement sur la séparation du temporel et du spirituel : maintenant, l’obéissance du croyant à Dieu différait de celle que le sujet devait à son roi et à l’église officielle.

Ici, je rappelle que, dès 1562, les petits pâtres du Languedoc, du Poitou, de Normandie ou d’Auvergne qui n’avaient jamais fréquenté l’école, s’ils parlaient journellement leur patois maternel lisaient la bible, écoutaient les sermons et chantaient les psaumes en françois qu’ils avaient appris dans la bible et les psaumes de Marot.

Or, dès l’interdiction du culte réformé par la révocation de l’Edit de Nantes, « l’église sous la croix » se structurait. Sans pasteurs pour la conduire, elle se réfugia dans l’ancien Testament et le chant des 150 psaumes de Marot (leur correction par Conrart terminée en 1683 n’aura pas eu le temps de parvenir dans les campagnes).
Très rapidement des hommes et des femmes entrèrent en transe, comme David ou Samuel et se mirent à prophétiser. Problème il y avait pour le royaume de France car le Dieu de l’ancien testament est Roi des armées, un dieu jaloux et vengeur qui justifiera la guerre des camisards.
On était bien loin du Dieu d’amour de l’Evangile.

Accélérateurs de l’adoption, par tous de la langue françoise, immenses leviers pour la liberté de culte, œuvre poétique et musicale, les psaumes de la Réforme se doivent d’être préservé et redécouverts.

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